La compassion est un concept qui peut à première vue sembler plutôt poussiéreux. Il a en effet été créé il y a 2500 ans. Il est ancien, et pourtant c’est toujours une valeur qui est au centre de nombreux mouvements humains. On entends parfois que le mot compassion peut être associé à un sentiment de sacrifice et même de faiblesse. Cette notion semble pourtant attirer l’attention avec une force particulière.
La compassion est une sensibilité à la souffrance en soi (l’auto-compassion) et de l’autre avec un engagement à la soulager et/ou la prévenir (Gilbert, 2014). Ce n’est donc ni un acte sacrificiel ni une faiblesse mais une force, une source de courage, de sagesse. C’est une motivation qui nous permet de nous libérer ainsi que les autres de la souffrance.
Pourquoi avons-nous besoin de compassion?
On pourrait s’attendre, si l’on part de cette définition à ce que la compassion soit au cœur du soin et de nos systèmes de santé. Pourtant, ces derniers fondés sur l’efficacité à libérer la douleur, évaluée en fonction des coûts, par opposition à la valorisation d’une prise en charge plus globale, ont progressivement mis de coté la compassion. Nous arrivons aujourd’hui à un modèle de soins «froid» qui s’apparente à un processus industriel. Même si les gains d’efficacité sont réels, un «effet secondaire» est une forme de déshumanisation des soins. Ce manque de compréhension de la souffrance au delà de la douleur physique ou de problématiques matérielles et l’absence de priorisation de la compassion s’est répandue dans la plupart des institutions humaines occidentales. Pour réintroduire la compassion dans nos organisations, il faudrait reconnaître la force humaine intérieure comme une ressource permettant de libérer la souffrance, au-delà d’une productivité matérielle.
Malgré les progrès extraordinaires de la santé et la richesse mondiales réelle, la souffrance humaine ne diminue pas. De nouvelles maladies se développent, les troubles psychologiques sont nettement accrus et la souffrance au travail provoquent des vagues de suicides, dans les entreprises privées comme dans les institutions publiques.
L’environnement est pris dans cette dégradation de la vie.
Nous assistons heureusement à l’émergence d’un nouveau désir, d’une volonté de penser différemment. On observe le développement d’une intelligence émotionnelle et rationnelle qui inclue non seulement l’individu en tant qu’unité isolée, mais le soi en tant qu’interconnexion de réseaux. On voit progressivement apparaitre la refonte d’une pensée de l’épanouissement collectif. La coopération et l’assistance mutuelle sont mises à profit pour créer un potentiel synergique vers une force de changement plus authentique et plus profonde.
La vie a évolué au cours de l’histoire par des développements successifs dans sa complexité. Les organismes unicellulaires ont été les premières unités de vie à collaborer pour créer des organismes plus complexes. Ce faisant, ils ont élargi leurs capacités d’adaptation à de nouveaux environnements et à de nouveaux défis.
Ces êtres ont appris à partager leurs ressources, à co-créer des maisons, des villages et des États. Aujourd’hui, nous avons la possibilité de réinventer une nouvelle forme de coopération, grace à un nouvel objectif commun: soulager la souffrance. Créer une nouvelle dynamique et permettre de libérer une énergie puissante, écologique et sociale: la Compassion.